Friday 27 February 2009

World food crisis severe and growing - Oxfam

photo from the 'Nature and Human: Friend or Foe' project by Indonesian youth group eighterscreativity.com
Urgent action is needed to prevent hundreds of millions more people slipping into hunger as a result of volatile food prices and increasing energy and water scarcity. Decades of underinvestment in agriculture coupled with the increasing threat of climate change mean that despite recent price falls, future food security is in jeopardy, Oxfam told a UN World Food Program conference.

Two new reports: Oxfam's A Billion Hungry People and the UK think tank Chatham House's The Feeding of the Nine Billion, call on political leaders, corporations and NGOs to deal with structural causes of chronic hunger: 1 in 6 people in the world.

They predict world food demand for food will increase almost 25% as the world's population grows by 2.5 billion, to 9.2 billion by 2050. As Frances Moore Lappé has stated many times, the problem is not absolute lack of food, but unfair trade created by market forces and maldistribution. And climate change will increase the undernourished by another 40 to 170 million.

Despite a fall in world food prices from 2008 highs, they are well above those of past years and are likely to rise sharply again in the future. Speculation, price volatility and corporate land grabs increase the hunger problem. (voir aussi l'article de Guy Debailleul en bas)

Current food shortages in Afghanistan, Ethiopia, Kenya, Mozambique and Zimbabwe are evidence that the global food crisis is far from over. Even before recent price rises, over 850 million people were undernourished. Now, there are nearly a billion, as a result of the price rises, alongside other factors such as political instability and conflict.

"International institutions and donors must reverse decades of under-investment in agriculture and scrap blatantly distortionary polices such as biofuels," said Oxfam food researcher Carlos Galian. He called recent EU and USA subsidies "a retrograde step that calls into question their commitment to longer term reforms."

Oxfam urges the rich to improve humanitarian aid and demands that poor countries (with help from new carbon and mitigation funds) invest in agriculture, targeting women and small-scale producers, and increase social protection measures for the vulnerable, including cash payments and job-creation programs for those at risk of hunger. This is exactly the opposite of the World Bank's SAP/ PRSP policies for the last 20 years, backed by the Washington consensus.

The Food Crisis in Figures
  • One in six of the world's population is hungry, almost a billion people.
  • 13 million children are born annually with intrauterine growth restriction, meaning that stunting sets in even before children are born due to the hunger experienced by the mother.
  • Between 50 and 60 % of all childhood deaths in the developing world are hunger related.
  • The risk of death is 2.5 times higher for children with only mild malnutrition than it is for children who are adequately nourished.
  • The proportion of overseas development assistance spent on agriculture has fallen from almost a fifth in 1980 to just 3 per cent today.
  • Poor people are particularly vulnerable to changes in food prices, with many spending up to 80 per cent of their income on food.
Even before the recent crisis:
  • More than 24,000 people died of hunger related causes every day
  • Five million children under the age of 5 died every year of hunger related causes
  • 16,000 children died every day of hunger-related causes - one every five seconds
See also Oxfam 24 Sep 08: rich countries have broken their promises on aid. Grain.org reports corporate land grabs in poor countries. Doctors with Borders warn that 10,000 children die of malnutrition each day. Pat Mooney's ETC group severely criticizes OECD countries in its H(a)LF a Loaf report. Frances Moore Lappé's Food First analyzes root causes of global hunger, poverty, and ecological degradation, and helps Third World projects. Canadian Foodgrains Bank is a similar aid group.
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Main basse sur les terres agricoles du Sud
par Guy Debailleul (président, Plan Nagua) tiré du numéro d'Alternatives du 26 février 2009

Des États riches et des entreprises multinationales achètent ou louent à très long terme des superficies considérables de terres agricoles dans les pays en voie de développement. Portrait d’une véritable ruée, exacerbée par la crise alimentaire, qui a un fort relent de colonialisme et dont les conséquences pourraient être désastreuses.

L’Arabie Saoudite a pris le contrôle d’environ 1,6 million d’hectares de terres en Indonésie, soit à peu près les trois quarts des terres cultivées au Québec  ! Et conjointement avec les Émirats arabes unis, l’Arabie Saoudite s’est appropriée 1,4 million d’hectares dans des pays comme le Pakistan ou le Soudan. La Turquie, le Kazakhstan, le Cambodge, les Philippines, l’Ouganda sont également visés par les pays du Golfe Persique. Il s’agit là aussi d’assurer l’approvisionnement en céréales des pays investisseurs dans lesquels la rareté de l’eau limite la production agricole.

En Tanzanie, en moins d’un an, des compagnies internationales de production de biocarburants ont accaparé 11 millions d’hectares, soit pratiquement le huitième de la superficie du pays pour cultiver des plantes destinées à produire des biocarburants pour l’exportation. L’une d’entre elles, Sunbiofuels de Grande-Bretagne, a par exemple mis la main sur 40 000 ha pour produire du jatropha à des fins énergétiques, après avoir évincé les agriculteurs, qui ont reçu une maigre compensation. Comme le signale le Financial Times, qui rapportait l’événement, il sera très difficile pour le gouvernement tanzanien de récupérer ces terres afin d’y produire des aliments, puisque la concession est d’une durée de 99 ans.

À Madagascar, la compagnie sud-coréenne Daewoo avait négocié avec le gouvernement malgache la location pour 99 ans de près d’un million et demi d’hectares. Son projet était de cultiver du maïs, avec comme objectif une production annuelle de 5,5 millions de tonnes en 2023 destinées à être exportées en Corée du Sud. Ce pays asiatique importe actuellement 11 millions de tonnes de maïs par année, principalement des États-Unis. À cela, s’ajoutait la production d’huile de palme. Pour mener à bien son projet, Daewoo entendait faire venir de la main-d’œuvre principalement sud-africaine. La colère suscitée par les révélations entourant l’entente entre la compagnie et le gouvernement malgache, et par l’attitude arrogante dont la compagnie a fait preuve dans la justification de sa démarche, a eu raison du projet.

Ces exemples ne représentent qu’un petit échantillon dans une multiplication de transactions du même genre par des pays « accapareurs » (directement ou par le biais de certaines de leurs compagnies ou sociétés de placement). Ce sont aussi bien des pays européens (Grande-Bretagne, Suède), asiatiques (Chine, Corée du Sud, Japon dont les entreprises contrôlent déjà plus de 12 millions d’hectares à l’étranger), pétroliers (pays du Golfe Persique, Libye, etc.) que des compagnies de pays émergents (Brésil, Inde). Les pays cibles sont également répartis sur à peu près tous les continents : Amérique latine (Paraguay, Argentine), Asie (Birmanie, Cambodge, Laos, Indonésie, Philippines, Thaïlande, Vietnam), Europe centrale (Ukraine), Afrique (Sénégal, Mali, Malawi, Ouganda, Soudan, Tanzanie).

Ces listes non exhaustives ne font qu’illustrer un mouvement qui prend une ampleur préoccupante. Les pays et les compagnies qui investissent ainsi dans le contrôle de grandes superficies de terre agricole sont guidés par des raisons qui peuvent varier : s’assurer un approvisionnement en produits alimentaires pour les uns, accroître la production de biocarburants pour les autres ou simplement, en ces temps de débâcle financière, investir dans ce qui apparaît comme étant le meilleur véhicule de placement à long terme pour des fonds spéculatifs. Ces raisons relèvent toutes d’un même constat : la crise alimentaire et la crise énergétique ont mis en évidence le caractère limité des disponibilités en terres agricoles pour satisfaire à la fois les besoins énergétiques et les besoins alimentaires d’une population mondiale croissante et confrontée à l’épuisement des énergies fossiles. Il est ironique que les mêmes pays qui ont tenté de libéraliser le commerce des produits agricoles au cours de la ronde de Doha, en invoquant les vertus du libre-échange pour assurer les besoins de la planète, semblent soudain accorder une confiance limitée à une telle stratégie puisqu’ils optent pour le contrôle direct de la terre et des ressources productives.

Un nouveau colonialisme

Presque 50 ans après les grands mouvements de décolonisation, les terres agricoles des pays en développement sont donc en train de devenir l’objet d’une nouvelle prise de contrôle par des intérêts étrangers. C’est d’ailleurs au nom du rejet d’un néocolonialisme que le projet sud-coréen à Madagascar vient d’avorter. Mais ce recul, s’il montre qu’une mobilisation peut entraver l’aboutissement de tels projets, n’est encore qu’une exception dans un mouvement qui prend de l’ampleur.

Si le patrimoine agricole des pays en développement suscite tant de convoitise et donne lieu à de telles concessions, c’est naturellement en raison de la dépendance de ces pays à l’égard des investissements étrangers. Il est facile de faire miroiter aux agriculteurs locaux les retombées économiques et les avantages, notamment en matière de diffusion de nouvelles pratiques et technologies agricoles. D’autant plus que de nombreux pays n’ont toujours pas adopté de régimes fonciers qui assurent des titres de propriété aux paysans en place. Beaucoup d’entre eux n’ont encore accès à la terre que par le biais de droits coutumiers complexes et souvent arbitraires. Dans d’autres pays, c’est plutôt le contrôle de la plus grande partie des terres par une toute petite minorité qui empêche les paysans de disposer de quantités suffisantes de terres pour leur permettre d’en vivre. Ainsi au Paraguay, plus de 75 % des terres agricoles sont la propriété de moins de 1 % de la population. Dans de telles situations d’inégalité ou d’insécurité foncière, il est donc plus facile d’écarter les paysans au profit de grands projets.

Les pays du Nord, eux, se protègent

La plupart des pays occidentaux ont au contraire eu tendance depuis déjà plusieurs décennies à adopter des législations plus ou moins restrictives en matière d’achat de terres agricoles par des étrangers. Aux États-Unis pas moins de 28 États ont des législations qui limitent les possibilités d’acquisitions de terres par des non-résidents. Il en est de même pour une majorité des provinces au Canada. Au Manitoba ou en Saskatchewan, un non-résident ou une compagnie étrangère ne peut posséder plus de 20 hectares de terres agricoles. On trouve des restrictions du même type en Australie, en Nouvelle-Zélande et dans certains États européens. Plus les terres agricoles sont vastes et la densité de population faible, plus les besoins de protection sont manifestes, ce qui explique que des provinces comme l’Ontario ou le Québec, à forte densité de population, ne se sont pas senties autant menacées par l’achat de terres par des étrangers.

Ce mouvement d’accaparement des terres agricoles par des intérêts étrangers, qu’ils proviennent des pays occidentaux, des pays du Golfe ou des pays émergents a incontestablement des allures de nécolonialisme. Au moment où - à la faveur de la crise alimentaire - la communauté internationale réalise enfin que l’on a trop longtemps négligé l’agriculture des pays en développement, cette confiscation d’une partie de leur patrimoine foncier pour satisfaire en priorité les besoins des pays les plus riches envoie décidément un signal contradictoire avec les efforts de concertation et de mobilisation pour redonner un nouvel élan à l’agriculture des pays pauvres.

Dans les récentes négociations commerciales de la ronde de Doha, de nombreux pays en développement ont commencé à opposer le principe de souveraineté alimentaire à celui de libéralisation des échanges. Ils revendiquent ainsi le droit de définir et de mettre en place les politiques agricoles qui leur semblent appropriées, et de prendre les mesures nécessaires pour protéger leur agriculture. C’est à ces conditions que leur propre sécurité alimentaire sera possible. Devant ce mouvement de ruée vers leurs terres agricoles, on observe que la souveraineté alimentaire implique de se donner les moyens pour contrôler la ressource fondamentale dont dépend la satisfaction des besoins alimentaires, c’est-à-dire les terres agricoles. Ce contrôle sera d’autant plus efficace que les paysans pourront disposer de droits garantis et stables sur cette ressource.

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